Author Topic: Rejet de la loi Hadopi.. en vidéo  (Read 3956 times)

saddic

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Rejet de la loi Hadopi.. en vidéo
« on: 12 April 2009 à 10:13:02 »
Ralalalala, moi j'aime bien le cirque, surtout quand c'est a l'assemblé et qu'une bonne partie des députés UMP sont en vacance  :mrgreen:
Assemblée Nationale
ça ressemble quand même un peu a du cirque non ?

P.S. : enfin une bonne nouvelle !

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Re : Rejet de la loi Hadopi.. en vidéo
« Reply #1 on: 14 April 2009 à 09:49:06 »
ouais c'est vraiment trop fort, comme quoi les bonnes vieilles ruses ça marche toujours apparemment :D

le souci c'est que la loi repasse dans 15 jours je crois et que là ya peu de chances qu'on y échappe :)
je connais un proverbe chinois qui ne dit rien, je l'utilise souvent quand je n'ai rien à dire

jey

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Re : Rejet de la loi Hadopi.. en vidéo
« Reply #2 on: 11 June 2009 à 16:39:54 »
Un magnifique article de canardpc! :)



Dans la jungle, terrible jungle juridique, un cri de douleur, de rage et de honte résonne avec une telle force que des millions d'internautes l'entendent et poussent, tous en cœur, un soupir de soulagement. C'est que, voyez-vous, dans la jungle, terrible jungle juridique, régnait jusqu'à peu un prédateur redoutable, appelons-le Predatine Albanos.

Predatine est un monstre femelle très, très méchante, qui rêvait d'être la quatrième Moire et de couper le fil ADSL de la vie numérique des hommes modernes. On murmure que Klotho, Lachesis et Atropos, jalouses de cette nouvelle venue, déclamèrent que s'appeler Albanos quand on veut couper le fil d'Albator, le pirate de l'espace, c'est un peu naze, mais après tout, pour qui se prennent-elles ces Moires, je vous le demande !

Toujours est-il que Predatine Albanos apparaissait comme un monstre redoutable à l'arsenal juridique futuriste. Dans sa chasse à l'homo numericus, elle guettait au centre de la toile mondiale du web des milliers d'adresses ip, scannant sans répit les réseaux P2P. Une fois ses victimes repérées, elle pouvait, susurre-t-on aux enfants pas sages, pour les effrayer, lancer un filet de mails et de lettres recommandées pour clouer au sol les petites ip. Puis là, une fois les proies à terre, elle n'avait plus qu'à les achever en leur coupant le fil ADSL grâce à son arme de riposte, pas si graduée que cela.

Cette situation effrayante encouragea quelques députés et sénateurs à se regrouper et à envoyer sur place un groupe de 11 Space Marines pour traquer la bête : ce fut un massacre.

Il faut comprendre que, si ces Space Cowboys au teint buriné par des années de pouvoir éclairé pouvaient apparaître un peu trop âgés pour maîtriser ce fauve, ils disposent d'un arsenal juridique d'une puissance inouïe, que l'on dénomme entre spécialistes, le "bloc de constitutionnalité".

Ce bloc, c'est la bombe atomique du droit. Ce bloc, c'est, par l'effet du principe de hiérarchie des normes, le socle et le sommet de notre système juridique. Aucune loi ne peut être contraire aux principes contenus dans ce bloc de constitutionnalité, qui regroupe, tenez-vous bien, la Constitution de 1958 qui a institué la Vème République dans laquelle nous vivons, suivez-un peu je vous prie ou nous n'y arriverons pas, mais également la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le Préambule de la Constitution de 1946, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, la charte de l'environnement et les principes dégagés par le Conseil constitutionnel, composé donc de 11 sages qui ont pour mission sacrée de "garder" ce bloc et de le faire respecter.

Et dans le cas de Predatine Albanos, cet arsenal constitutionnel a été utilisé par le Conseil et ses 11 mercenaires avec violence et préméditation.
Ceci dit, la bête immonde n'est pas folle ; elle tenta d'utiliser sa capacité de caméléon pour se fondre dans la masse des lois constitutionnelles. Il fallut donc d'abord la débusquer.

Tâtant le terrain, les 11 éliminèrent en premier lieu les zones juridiques où l'on ne pourrait la trouver. C'est ainsi que :

- si, selon les requérants, le Gouvernement n'aurait pas fourni au Parlement les éléments objectifs d'information susceptibles de fonder des débats clairs et sincères, le Conseil a décidé que les assemblées ont disposé, comme l'attestent tant les rapports des Commissions saisies au fond ou pour avis que le compte rendu des débats, d'éléments d'information suffisants sur les dispositions du projet de loi en discussion.

- En ce qui concerne l'obligation de surveillance de l'accès à internet : la définition de cette obligation est distincte de celle du délit de contrefaçon et se trouve énoncée en des termes suffisamment clairs et précis pour que la loi soit intelligible. Il n'y a donc pas double emploi entre la répression de la contrefaçon et celle du manquement à l'obligation de surveillance de sa ligne d'accès à internet.

- Concernant le renvoi à des décrets pour définir les modalités de délivrance du label HADOPI certifiant qu'une source de téléchargement est légale:

Le Conseil n'y trouve rien à redire, rappelant qu'il s'agit d'une information du public et que HADOPI sera dans l'obligation de délivrer ce label à tout site en faisant la demande qui remplit les conditions légales. Le législateur est donc dans son rôle, le décret n'a plus qu'à préciser lesdites modalités.

Predatine parvient donc à éviter les premières attaques. Mais rapidement, l'expérience des 11 leur permet de repérer le monstre et de verser le premier sang.

- Ainsi, en ce qui concerne la répression des manquements à l'obligation de surveillance, le Conseil sort l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et ouvre le feu: Cet article dispose en effet que "La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi".

Le Conseil en déduit qu'en l'état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu'à l'importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l'expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d'accéder à ces services.

La bête est touchée ; elle hurle sa douleur ! Et ça lui fait doublement mal, car, avec une telle rédaction, le Conseil "avalise" pour ainsi dire, même si juridiquement il n'en n'a évidemment pas le pouvoir, le fameux amendement Bono qui vise, au niveau européen, à faire reconnaître que l'accès à internet est un droit aujourd'hui fondamental que l'on ne peut couper comme cela. Et c'est justement ce que confirme le Conseil. Nous savons donc aujourd'hui que l'accès à internet est protégé par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen.

- Entrons maintenant dans le vif du sujet et admirez la manœuvre des 11 qui vont attirer le monstre blessé dans un piège. Comme on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre, il faut commencer par lui aménager une sorte de voie de secours que Predatine, affolée, va emprunter pour s'enfuir.

C'est ainsi que le Conseil reconnaît que les articles 2 et 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen protègent la propriété privée, et que la lutte contre la contrefaçon d’œuvres de l'esprit répond à ce noble objectif. Predatine respire...

Et le Conseil poursuit sa manœuvre en reconnaissant également qu'aucun article du bloc de constitutionnalité ne s'oppose à ce qu'une autorité administrative (ce qu'est HADOPI) puisse exercer un pouvoir de sanction, et que l'article 34 de la Constitution qui dispose que  "La loi fixe les règles concernant... les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques", permet sans problème d'édicter des règles de nature à concilier la poursuite de l'objectif de lutte contre les pratiques de contrefaçon sur internet avec l'exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, écrire et imprimer.

A ce stade, Predatine pense s'en être sortie avec une vilaine blessure, mais rien de trop grave. En fait, elle se jette tête baissée dans le piège et, une fois tombée dedans, c'est l'apocalypse nucléaire.

Le Conseil précise en effet que, toutefois, la liberté d'expression et de communication est d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés ; que les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi.

Or, les pouvoirs de sanction institués par la loi habilitent HADOPI, qui n'est pas une juridiction, à restreindre ou à empêcher l'accès à internet de titulaires d'abonnements ainsi que des personnes qu'ils en font bénéficier ; que la compétence reconnue à cette autorité administrative n'est pas limitée à une catégorie particulière de personnes mais s'étend à la totalité de la population ; que ses pouvoirs peuvent conduire à restreindre l'exercice, par toute personne, de son droit de s'exprimer et de communiquer librement, notamment depuis son domicile ; que, dans ces conditions, eu égard à la nature de la liberté garantie par l'article 11 de la Déclaration de 1789, le législateur ne pouvait, quelles que soient les garanties encadrant le prononcé des sanctions, confier de tels pouvoirs à une autorité administrative dans le but de protéger les droits des titulaires du droit d'auteur et de droits voisins .

Le Conseil, littéralement on fire, continue sans répit, soulignant que l'article 9 de la Déclaration de 1789 dispose que tout homme est présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable. Qu'il en résulte qu'en principe le législateur ne saurait instituer de présomption de culpabilité en matière répressive mais que, toutefois, à titre exceptionnel, de telles présomptions peuvent être établies, notamment en matière de contravention, dès lors qu'elles ne revêtent pas de caractère irréfragable, qu'est assuré le respect des droits de la défense et que les faits induisent raisonnablement la vraisemblance de l'imputabilité.

Or, c'est justement ce qui fait gravement défaut à HADOPI qui prévoyait que, pour s'exonérer des sanctions, il incombait au titulaire du contrat d'abonnement d'accès à internet de produire les éléments de nature à établir que l'atteinte portée au droit d'auteurs ou aux droits voisins procède de la fraude d'un tiers ; il s'agit là d'un renversement de la charge de la preuve qui est contraire à l'article 9.

Cela signifie donc que HADOPI ne peut, en l'état, rien faire d'autre que de prévenir le titulaire d'un abonnement que son adresse ip a été vue en train de commettre une contrefaçon. Mais elle ne peut pas punir. Pour ce faire, il faudra saisir le juge, ce qui met littéralement à terre le principe même de la loi, qui voulait justement éviter le recours au juge.

Predatine Albanos, gravement blessée, parvient cependant à s'extraire du piège pour s'enfuir en boitant. Les 11 ont, de leur côté, liquidé une grande partie de leur arsenal et puisent maintenant dans leurs réserves. Je veux dire, leurs réserves d'interprétation. Les réserves d'interprétation sont un moyen pour le Conseil de dire que tel ou tel article d'une loi est conforme au bloc de constitutionnalité à la condition expresse qu'il soit entendu de telle ou telle manière. Ainsi:

- concernant le droit au respect de la vie privée: Le Conseil rappelle que c'est un principe reconnu à l'article 2 de la Déclaration de 1789, mais qu'il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre le respect de la vie privée et d'autres exigences constitutionnelles, telles que la protection du droit de propriété.

Or, Hadopi est composée d'agents assermentés désignés par les organismes de défense professionnels régulièrement constitués, par les sociétés de perception et de répartition des droits ou par le Centre national de la cinématographie. Ces personnes, privées, ne sont pas investies du pouvoir de surveiller ou d'intercepter des échanges ou des correspondances privés mais le Conseil reconnaît qu'elles auront, dans le cadre de leur mission, le pouvoir de mettre en oeuvre un traitement de données à caractère personnel (puisqu'elles auront à collecter les données permettant d'identifier les titulaires d'un abonnement), ce qui n'est possible que si, et seulement si, cela n'a pour finalité que de permettre aux titulaires des droits d'auteur d'exercer un recours juridictionnel à l'encontre des contrevenants.

Par conséquent, les données ne pourront être transmises qu'aux autorités judiciaires et il appartiendra à la CNIL, saisie pour autoriser de tels traitements, de s'assurer que les modalités de leur mise en oeuvre, notamment les conditions de conservation des données, seront strictement proportionnées à cette finalité.

Vous voyez que, même sur leurs réserves, les 11 peuvent faire du dégât, car ils réintroduisent la CNIL dans le processus, ce qu' également HADOPI voulait à tout prix éviter.

- Enfin, toujours puisant dans leurs dernières réserves interprétatives, concernant la possibilité qu'ont les ayants-droit à saisir en référé (procédure d'urgence) le Tribunal de grande instance à l'encontre des FAI pour qu'il soit ordonné la suspension temporaire de l'accès à internet d'un supposé pirate, le Conseil dit que oui, c'est possible, mais à la stricte condition que le juge ne prononce que les mesures strictement nécessaires à la préservation des droits en cause. On peut imaginer que cela signifie que ne soit coupé que l'abonnement qui ne sert strictement qu'à pirater, et non pas l'abonnement qui sert également à la vie numérique telle qu'on la connaît aujourd'hui.

Predatine Albanos s'est cependant malgré tout enfuie. Elle n'est pas morte (pour cela, il aurait fallu que le Conseil annule toute la loi), mais elle est grièvement blessée, acculée, elle a perdu dans la bataille ses deux armes principales : l'absence du juge et de la CNIL. En l'état, elle ne peut plus que prévenir l'internaute de ce que son adresse ip est utilisée dans le cadre d'une contrefaçon. Mais bon, si c'est, au final, pour en arriver à saisir le juge, on avait déjà la DADVSI pour ça !

Attendons cependant de voir ce que le monstre va faire, nul doute que, dans un sursaut, il tentera de se bricoler quelques nouvelles armes, mais après une telle raclée, il est fort à parier qu'il n'effraie plus grand monde.

Générique de fin

Dernière image: le monstre immonde lêche ses pustulentes plaies avec sa langue rapeuse souillée d'une bave épaisse. Il va mourir, il le sait bien, mais, voilà qu'apparaît le DADVSI avec sa jambe en Nicolas Sarkozy, terrifiante créature attirée par la douleur de Predatine. Leurs regards se croisent et voilà que le DADVSI pose sa patte sur l'épaule de Predatine, la soulève et l'emporte dans son antre.

The end ?
« Last Edit: 11 June 2009 à 16:42:13 by jey »
/!\ Ce site est nul -> http://www.tabularasa.fr  /!\

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Re : Rejet de la loi Hadopi.. en vidéo
« Reply #3 on: 12 June 2009 à 01:10:25 »
magnifique !!  :yahoo:

mais putain c'est pas court, j'ai commencé à lire à 18H...
je connais un proverbe chinois qui ne dit rien, je l'utilise souvent quand je n'ai rien à dire

saddic

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Re : Rejet de la loi Hadopi.. en vidéo
« Reply #4 on: 12 June 2009 à 18:49:12 »
MDr, j'ai rien lu mais MDR ^^